Les jeux avec balise [SECONDE CHANCE] sont des jeux rétros auxquels j'ai joué gamin, mais que j'ai lâché trop vite pour me faire un vrai avis. Alors j'y retourne un peu pour voir ^^
Rampage (Atari ST, 1987)
La découverte, la passion éphémère et l’oubli prématuré.
Au risque de me répéter, voire devenir incohérent, j’ai envie de dire que Rampage nous amusait comme des petits fous, sur l’Atari STE de mon meilleur pote. Peut-être même autant qu’
International Karate +, tiens. Il avait aussi le mérite de moins solliciter nos neurones que
Lemmings, tout en nous défoulant presque plus que
Double Dragon... selon le point de vue, du moins. Et pendant un temps, il nous fallait notre dose de destruction d’immeubles au cours de chaque journée passée chez lui. Pas de sentiment de sérénité ou de complétude, sinon. Je crois qu’on ne l’a jamais terminé. Enfin je ne crois pas, j’en suis convaincu, vu qu’on n’essayait même pas de gagner, encore moins de scorer au max. On se défoulait juste cinq minutes dessus avant de nous lancer dans des batailles de G.I. Joe contre Boglins et autres monstres bizarres. Ces sessions revigorantes augmentaient sans doute la force des patates que mettaient les célèbres soldats de plastique dans la tronche des figurines de Xénomorphes ou du gros Bouffe-Tout de Ghostbusters (qu'est-ce qu'il douillait à chaque baston de jouets, celui-là). Et du coup, comme on s’en moquait un peu, le fait d’arrêter d’y jouer ne nous a pas non plus traumatisés, quoi. Mais quand même, j’ai l’impression d’avoir raté quelque chose, quand j’y repense. Des points de gameplay pas exploités, des niveaux trop survolés, ou pas testés du tout… j’espère bien découvrir tout plein de nouvelles features à m’en faire exploser la nostalgie.

Réappropriation du jeu
Lancement de la scène d'intro. Enfin de l'écran titre. Sur fond de city skyline nocturne du plus bel effet (toujours selon le point de vue), on nous présente un lézard géant qui se prend un obus dans le bide, et un loup tout aussi immense, poing levé et babines retroussées, qui engueule sans doute le lanceur du missile en question. Au milieu, le mot Rampage écrit en énormes lettres jaunes et rouges, un bras poilu transperçant le P. Entre les doigts boudinés, une femme les poings sur les hanches, semblant modérément agacée par sa situation, dans une robe rouge à la coupe plutôt légère, et donc tout à fait adaptée à ce genre d'activités. Mais mdrrrr la gonzesse capturée comme dans King Kong et qui ne hurle même pas de terreur ! Trop pas crédible le truc ! Mis à part ce détail, euh… MAIS C'EST GÉNIAL ! Mon pote ne m'a pas menti, on part sur du très lourd rien qu'avec cette image, surtout quand on est un petit mecton de six ou sept ans biberonné aux gros pecs de Sly et Governator. Très vite, apprend que le reptile s'appelle Lizzy, le canidé se nomme Ralph et que le bras appartient à un gros primate répondant au doux prénom de George. La femme en robe s'appelle Denise, mais là c'est moi qui invente. On passe sur le lore, qui explique pourquoi ces trois aberrations existent : des êtres humains qui ont muté à cause d'expériences scientifiques ayant mal tourné. Une expérience différente pour chacun, mais au timing visiblement similaire, parce que pourquoi pas ? On adore les coïncidences de ce genre, nous. Comme dans
IK+, on peut lancer une partie à un, deux ou trois joueurs. Et pas du tout comme dans
IK+, on doit exploser des immeubles pour gagner. On grimpe dessus et on tape en tout plein d’endroits pour les faire tomber, et on passe au niveau suivant, et ainsi de suite, perpétuant ainsi, la grande chaîne d'un gameplay un poil redondant quand même. Beaucoup de critiques mettent l’accent sur ce point. Bon après, on n'avait pas le temps de se lasser, on mourait avant.

Forcément, les autres gens, ceux qui n'ont pas muté, ils se défendent un peu. En tout cas ceux qui bossent dans l'armée. Chaque stage nous envoie toujours plus d'hélicoptères, soldats armés de guns, sticks de dynamite ou bombes, tanks… d'ailleurs, je sais que notre entreprise de démolition se déroule aux États-Unis, mais y a quand même beaucoup beaucoup d'individus armés, dans ces immeubles ! Et ils nous canardent sans vergogne en plus ! Pas facile d'éviter tout ce qui nous arrive sur la tronche, avec notre grosse carcasse de dix mètres de haut à se trimballer. On finissait toujours par crouler sous les balles et les roquettes avec mon pote. En vrai, je trouvais ça hyper dur assez vite. Dire qu'il existait cent vingt-huit stages, représentant tous une ville américaine (dont les noms varient selon les portages, s’exportant même au Canada pour certaines), et qu'il faut se les retaper six fois chacun pour réellement terminer Rampage ! Du moins sur Arcade, ça se passait comme ça. Apparemment, les développeurs ont affirmé que personne n'en avait jamais vu le bout. Oui bah d'accord, facile de concevoir un jeu impossible à finir. Un
Super Ghouls’n Ghosts trois fois plus long et qu'il faut recommencer quinze fois, personne ne le finit non plus. Pas plus qu'un
R-Type Delta. Mais eux, il faut déjà réaliser l'exploit de les terminer une seule fois tout court. Au moins, dans Rampage on peut rendre les coups, et exploser à peu près n'importe quoi d'une simple mandale. À part les immeubles, faut pas abuser. Mais anéantir un chopper qui a divisé notre barre de vie par deux, jouissif quand même. Écraser deux chars, un tram et cinq bagnoles sans se faire toucher une fois, encore mieux.

Et puis on mange aussi, tout le temps ; le plus souvent des gens qui appellent à l'aide depuis leurs apparts miteux, en tout cas ceux qui n'ont pas leur carte super golden bullet à la NRA. Ils nous refilent un peu de santé quand on les croque, “Merci pour votre service”. Tiens d'ailleurs, la femme en rouge de l'écran d'accueil fait partie des potentielles victimes. Dans la version arcade, je l'ai vue tabasser le gros George et s'enfuir alors qu’elle se trouvait entravée dans sa main, prête à se faire dévorer ; comme quoi je l'avais mal considérée, avec son maquillage et son décolleté. Elle était effectivement juste fâchée et bien capable de se défendre toute seule. Recevoir une leçon de féminisme par un jeu de 1986 dans lequel des gros monstres rasent des buildings pour passer le temps, il fallait le faire. Eh mais il y a une femme parmi ces monstres, alors… Rampage, un allié de la cause ou quoi ? Cela dit, je ne crois pas que sa cousine de la version Atari ST se débrouillait aussi bien, voilà d'où viennent mes préjugés. En partie du moins. Qui peut-on grignoter encore ? Les mutants eux-mêmes ! Lorsque leur barre de vie tombe à zéro, ils reprennent forme humaine et tentent de s'éclipser discrètement hors de l'écran. Ils se tiennent l'entrejambe vu qu'ils sont à poil, expldrrrr. Raison de plus pour les boulotter, tiens. Il n'avaient qu'à enfiler des slibards de la même marque que les fringues que l'on trouve dans Dragon Ball. Est-ce que les gens finissent tout nus après avoir encaissé trois Final Flash dans
La Légende Saien ? Jamais ! Allez, on rentre dans le rang, le jeu vidéo soi-disant déconstruit, là ! On dénichait d'autres items en brisant les vitres des gratte-ciel : des télés par exemple, qu'il ne fallait pas croquer, sous peine de se prendre une belle châtaigne. Des baignoires, enfin je crois, qui immobilisaient quelques secondes, le temps de réussir à la mâcher (faut être con pour manger une baignoire aussi). Enfin, d'autres trucs qui rapportaient des points. Juste des points, ou de la vie aussi, je sais plus. Mais il en existait moins que sur arcade, j'en suis quasi-certain. Enfin, on pouvait se prendre les pieds dans des bassins remplis d'eau. Comme si ça existait, des piscines en plein air qui occupent toute la largeur d'une avenue, hein ! Alors voilà, on arrive au point sur lequel s'accordent à peu près tout le monde. Ça tourne vite en rond. Et donc, on faisait quoi pour relancer un peu l'intérêt du truc ? Bah on se tabassait. Ouais, comme dans
Streets of Rage ou
Golden Axe ; et on adorait ça, même si ça nous faisait perdre en même pas trois minutes.

Nouvelle plongée dans l’OST
Rampage réussit l'exploit de proposer de la musique sur Atari ST, alors que même la version arcade n'en joue pas ! Nous devons ce miracle à David Whittaker, un grand merci à ce compositeur très actif dans les années 80 et le début des 90 sur les bécanes à la mode. On lui doit les B.O. de Barbarian, celle de Ghosts and Goblins sur Amstrad CPC, SimCity sur Atari ST, les versions sur vieux ordinosaures de Tetris, ainsi que les portages sonores de
Bubble Bobble et
Golden Axe. Alors, il n'a sorti qu’une compo pour Rampage, hein, ne nous enflammons pas non plus. Pas le meilleur parti pris pour trancher avec la monotonie du gameplay, a priori. Malgré tout, elle déboîte plutôt bien, cette musique. L'espèce de longue sirène qui monte dans les aigus au début, puis la mélodie dramatique qui se lance, accompagnée d'horribles trilles stridents que j'ai appris à adorer, la nostalgie aidant (la nostalgie faisant tout le travail serait plus correct). Ouais… comme ça boucle indéfiniment, sans d'autre pause que l'écran indiquant la ville suivante à dégommer, je le demande si on n'arrêtait pas nos parties à cause de ce morceau, et ce même avant d'écluser toutes nos vies. Ça devait nous rendre fous, surtout en plein sugar rush, après avoir ingurgité un goûter uniquement composé de Princes au chocolat. Tu m’étonnes que nos jouets se retrouvaient toujours avec des membres arrachés.
Rampage - Music
Regrets ou pas ?
Je pense que si je rejouais à Rampage aujourd'hui, je tiendrais difficilement plus de cinq minutes. Il fait partie de ces jeux que je préfère laisser à l'état de disquette poussiéreuse au fond de ma tête, plutôt que de risquer de me le gâcher pour toujours en le relançant. Grâce à mes jolis souvenirs, j'ai choisi de regarder le film de 2018 lors d'un trajet en avion, et pas autre chose. Tout du long, je cherchais les références au jeu vidéo, un sourire niais collé sur le visage, presque indifférent à la médiocrité des scènes défilant devant mes yeux. Heureusement que Dwyane Johnson rend le truc un peu regardable quand même. Désolé mon gars, mais ton personnage, aussi baraqué soit-il, n'aurait pas tenu dix secondes sur Atari, on t'aurait gnaqué comme les autres, mon pote et moi. N'empêche, la franchise a vu naître pas moins de sept jeux en tout, le dernier sorti la même année que le blockbuster de The Rock, comme partie intégrante de la promo. J'ose espérer que les mécaniques ont un poil évolué depuis 1986, sinon ça ferait vraiment beaucoup de tournage en rond. Je n'irai pas me renseigner, autant par peur de perdre mon temps que de me donner envie d'en essayer un ou deux (et donc perdre encore plus mon temps). Mais je salue l'abnégation de ceux qui ont testé tous les opus. Je m'arrête là, avant de changer d'avis et de les considérer comme de gros tarés.
