Slider (Game Gear, 1991)
La découverte, la passion éphémère et l’oubli prématuré.
Impossible de me rappeler comment ce jeu a incrusté ma maigre ludothèque Game Gear. Ça m’étonnerait que j’aie flashé sur l’artwork de la boîte, je crois qu’au contraire elle me faisait archi peur. C’est quoi ces tronches de monstres psychopathes, sérieux ? Du coup j’imagine que mon père me l’a offert pour un annive ou un noël de 1992 ou 1993. Ma mère faisait comme si la Game Gear n’existait pas, la vision de cette petite machine portable lui était trop difficile à supporter. Elle ne m’aurait jamais acheté de jeu dessus. En tout cas, aussitôt lancé, j’ai compris que j’allais laisser Columns de côté pour un bon moment ! Même Sonic Triple Trouble aura eu du mal à me faire lâcher, bien aidé par le fait que je n’arrivais plus à progresser dans Slider. Avais-je au moins atteint la moitié du jeu ? J’espère bien, vu le temps que j’ai passé dessus. En tout cas, j’ai toujours pensé que j’y reviendrais, jusqu’à ce que ma Game Gear rende l’âme et que je passe définitivement à la génération PC / 32-bits.
Réappropriation du jeu
Skweek, le nom du jeu au Japon et du personnage que l'on incarne, a vu le jour en 89 sur les ordis en vogue durant cette période. Il fait partie des action-puzzle, paraît-il. Notre avatar, sorte de boule de poils beaucoup moins flippante que sur la boîte, doit colorer toutes les cases d'un stage pour passer au suivant. En marchant dessus. Jusqu'ici le concept ne devrait poser de soucis à personne. Pour pimenter tout ça, un compte à rebours nous oblige à terminer un niveau dans un temps imparti. Et selon les niveaux, ça peut s'avérer très stressant. Ensuite, toute une panoplie de monstres hantent les lieux que l'on traverse. Certains parmi les plus malades bougent à peine, d'autres se déplacent plus vite qu’un guépard sous stéroïdes, d'autres encore nous tirent dessus. Heureusement, Skweek ne se contente pas juste de “glisser” sur les cases (le nom Slider doit venir de là, même si le personnage marche, bref), mais il balance des projectiles, lui aussi. J’imagine que nommer le titre Walker and Shooter n’aurait pas aussi bien fonctionné.
Qui dit action puzzle, dit level design au centre des débats. Sans surprise, on commence par des stages simplistes qui se complexifient par la suite. Il en existe 99, et si une bonne partie se ressemblent au risque de devenir redondants, les autres se démarquent par leur configuration parfois défiant l'invraisemblable. Grâce à une large gamme de tuiles aux rôles bien précis, les possibilités se multiplient. Il y a les cases glacées, qui nous emportent dans la direction qu'on a prise en arrivant dessus, les téléporteurs, les cases qui retirent toutes les autres adjacentes, celles qui explosent tous les ennemis présents à l'écran, celles qui vous poussent dans un sens et vous accélèrent dans l'autre… pas mal du tout.
Et puis il y a les bonus aussi ! Ils apparaissent régulièrement, à un endroit aléatoire de la map. Selon leur utilité, il vaut parfois mieux traverser le niveau en sens inverse pour le récupérer, plutôt que de colorier ses cases sans réfléchir. Car si certains n'ajoutent qu'un peu de points à notre total de score, d'autres améliorent le tir de Skweek, le rendent invincible pendant quelques secondes, ou nous donnent du temps supplémentaire. Il existe aussi quatre collectibles, des bonbons oursons de couleurs différentes, qui filent direct cinq vies et font passer au niveau suivant quand on les récupère tous ! Eh bah même avec ça, je ne crois pas avoir vu plus loin que les stages 65 ou 70. Je crois que j'ai craqué mentalement, en fait. Sans doute à cause d'un des plus horribles : un dédale sans murs, juste des cases et du vide. Et les monstres qui créent de nouvelles cases sur le vide ! Ouais ils peuvent tous faire ça, même ceux qui vont super vite. Impossible de repasser partout avant la fin du chrono. Hurlements de terreur, arrachage de cheveux par poignées.
Nouvelle plongée dans l’OST
Je ne sais pas d’où je sors ça, mais je crois depuis toujours que Koji Kondo a composé la musique. Bien sûr, je ne trouve plus l’info nulle part. Seul le nom de Michel Winogradoff apparaît maintenant, difficile d’avoir confondu les deux gars en lisant un peu trop vite. Mais il semblerait qu’il n’ait créé que la B.O. du jeu de 89 sur PC. Alors peut-être que pour le portage Game Gear, Koji a mis la main à la pâte pour retranscrire les mélodies qu’on entend sur Amstrad ou Atari. Sur plusieurs sites, on n’a même pas de nom de compositeur, voire il y a carrément écrit “on ne sait pas qui c’est”. Propre. En tout cas j’ai bien aimé, et j’aime toujours cette OST. Les morceaux collent bien au concept, sans surcharger une expérience déjà bien fournie. En général, ça sonne assez gai, pas trop compliqué et mignonnet. Mais évidemment, je préférais LE titre un peu mélancolique du lot, qui paraît limite tiré d’un autre jeu, et qui pourtant me donnait envie d’allumer la console à lui tout seul. Comme pour Columns ou Ecco II, ça me foutait les larmes aux yeux tout en me procurant une joie immense. Je sais, ça doit cacher un problème psychologique quelque part. Je vais y remédier… un jour. Il y a aussi la musique de fin, qu’on jurerait tirée de Link’s Awakening (oui d’accord, toujours pas Koji Kondo). Un peu dans la déprime positive aussi, parfaite pour une conclusion.
Slider - Gameplay Theme A
Regrets ou pas ?
Bon, autant j’ai adoré Slider sur le moment, autant aujourd’hui je ne vais pas en faire un fromage de ne jamais le terminer. Ça me va bien de le laisser là où il est, et de juste réécouter l’OST de temps en temps quand je tombe dessus dans ma méga playlist JV nostalgique. En tout cas, je refuse de poser les yeux une fois de plus sur cette cover horrifiante. Mis à part cette image sortie des enfers, ce titre reste une valeur sûre, qui se prend très bien en main, et que je trouve parfaitement adaptée à une console portable. Je suis content d’avoir possédé cette cartouche. Et je me déteste pour l’avoir foutue à la poubelle quand ma Game Gear a décédé. J’aurais tellement aimé que ma mère me mette en garde, en mode “attention, tu risques de regretter de jeter des vieux jouets / vieilles consoles.” Au lieu de ça, elle se réjouissait de me voir me débarrasser de mes “conneries” de gamin. Encore un truc à ne pas reproduire avec mon propre fiston, tiens.
